Shen et méditation-2
Le Shen dans les pratiques énergétiques chinoises.
Shen et méditation taoïste
De nombreux courants représentatifs de la méditation se rallient à la vision de l’alchimie interne qui conçoit l’esprit individuel comme partie de l’Esprit originel, porté momentanément par l’individu. Les pratiques méditatives et énergétiques visant alors à libérer et expérimenter cette présence en l’humain de l’Esprit Originel (Yuan Shen). Les termes utilisés par les courants méditatifs varient un peu en fonction des approches et des descriptions qu’ils s’autorisent à communiquer aux non-initiés.
Certains courants taoïstes, plus proches du Tch’an, ne retiennent pas cette notion d’Esprit Originel et considèrent que l’univers est en dernier lieu vacuité donc sans instance assimilable à un tel Esprit. Et quand ils retiennent cette notion d’Esprit, c’est uniquement en le considérant comme une phase transitoire qui mène à l’expérience ultime de la vacuité.
Shen et médecine traditionnelle
Tout d’abord, il convient de préciser que le terme de médecine traditionnelle est assez ambigu. Ce qu’on appelle actuellement médecine traditionnelle chinoise ou MTC est en fait une version moderne de la médecine ancienne, qui s’est construite au fil des rencontres entre médecine chinoise et médecine occidentale.
A partir de 1842, suite à la signature de traités d’ouverture entre la Chine et certains pays occidentaux, puis1911, suite à la révolution et l’avènement de la République Populaire et enfin à partir de 1949 après la prise du pouvoir par Mao Zedong, la médecine ancienne a évolué vers des formes plus rationnelles, bénéficiant des connaissances en anatomie et physiologie amenées par les médecins occidentaux.
Pour le meilleur et pour le pire, cette rencontre a transformé l’antique médecine. Elle a contraint à la suppression de nombreuses approches fondées sur des croyances et théories plus ou moins fantaisistes. Mais malheureusement elle a aussi fait disparaître des aspects particuliers, notamment ce qui a trait aux liens entre médecine énergétique et spiritualité. C’était un des prix à payer pour prétendre à quelque considération de la part de la médecine occidentale.
Dans la médecine ancienne, l’esprit individuel n’est que l’aspect limité et conditionné de l’Esprit originel qui s’intègre en l’homme au moment de la rencontre entre les Jing parentaux donc lors de la conception. L’esprit individuel est alors conçu comme ayant une origine extérieure à l’homme. C’est aussi cette vision qui prévaut majoritairement dans le chamanisme et la plupart des courants de l’alchimie taoïste.
La médecine « traditionnelle » contemporaine propose une approche différente. Dans son ensemble, elle considère que l’esprit est une propriété émergente du cerveau, donc produit par celui-ci. Sa source est alors exclusivement interne. Dans ce contexte, l’utilisation du terme psychisme paraît plus adapté que celui d’esprit.
Shen et relation au corps
Dans les deux approches, ancienne ou traditionnelle, l’esprit est toujours en étroite relation avec les niveaux physiologiques et énergétiques. Il peut en modifier le fonctionnement, en l’altérant ou l’améliorant et à son tour être influencé par ceux-ci.
La médecine chinoise a, durant 3 millénaires, théorisé avec beaucoup de finesse les relations psychosomatiques et somatopsychiques.
Le classique de la médecine chinoise, le Huangdi NeiJing, mis en forme vers le 2° siècle av. notre ère n’hésite pas à affirmer que toute maladie trouve son origine dans l’esprit et qu’un traitement qui ne finit pas par une action sur l’esprit est voué à l’échec…
En conclusion
Comme nous venons de le voir, le Shen ou esprit possède différentes significations qui varient en fonction des environnements et des époques.
Il est donc nécessaire, lorsqu’on aborde cette notion, de situer le contexte auquel on se réfère.
Pour le chamanisme ancien il est principalement représenté comme une instance extérieure et associé à des esprits hébergés par l’homme. Par leur présence, ils fournissent la base fonctionnelle nécessaire à l’apparition de l‘esprit humain.
Pour l’alchimie taoïste, il est conçu comme un Esprit originel imprégnant l’univers et dont l’homme peut être le dépositaire momentané. C’est alors le fondement de l’esprit individuel.
La médecine ancienne ainsi que la méditation taoïste se rallient globalement à cette vision.
Pour les courants liés au Tch’an, il n’est qu’une étape vers la réalité ultime : la vacuité.
Quant à la médecine traditionnelle chinoise, donc contemporaine, elle considère que l’esprit est une propriété émergente du cerveau, en quelque sorte « sécrété » par celui-ci. Il se présente alors comme la simple conséquence de son fonctionnement normal.
Quelle que soit l’approche, il existe à minima un point commun : cet esprit, moyennant diverses pratiques, peut s’affranchir de nombre de ses limitations et entrer en relation plus étroite et plus consciente avec les énergies et les rythmes de la nature. Ainsi, il peut devenir partie d’un tout, en résonnance harmonieuse avec celui-ci.
De ce point de vue, le taoïsme, dans sa dimension naturaliste, a laissé une empreinte profonde dans la culture chinoise, encore aujourd’hui.
Chaque sensibilité pourra certainement trouver sa préférence parmi ses différentes conceptions.
Les mystères de l’esprit ont encore de beaux jours devant eux…
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