Yin Yang et Tai Chi -2

Le Yin Yang et la tradition du Tai Chi Chuan

Yin Yang et Tai Chi

Tai Chi, Yin Yang et métaphysique taoïste

Avec quelques variantes en fonction des courants et des époques, le taoïsme propose une vision de la création de l’univers particulièrement intéressante. En voici une version simplifiée.

Au sein du WuJi, se produisit un mouvement qui engendra le Tai Chi, constitué d’un aspect yang et d’un aspect yin. Alors, les Souffles subtils apparurent et montèrent pour former le Ciel tandis que les Souffles grossiers descendirent et formèrent la Terre. Puis le Ciel et la Terre créèrent les dix mille êtres.

Le terme de Wuji nécessite quelques explications. Sa traduction littérale est sommet du néant. Dans la tradition taoïste, il désigne le vide d’où tout émerge et où tout retourne. Lorsque le Wu Ji frémit, il engendre le Tai Chi et son couple d’opposés Yin-Yang.
Nous ne sommes pas loin du concept de fluctuation du vide (effet Casimir) théorisé par la physique quantique.

Il faut comprendre dans cette formule taoïste que la notion de Ciel est associée au subtil, l’énergie tandis que la Terre est associée au dense, la matière. 

Comme la physique le démontre, matière et énergie sont deux états inséparables qui peuvent se transformer l’un dans l’autre, sous certaines conditions, dans un ballet incessant, tout comme yin devient yang puis yin….
Tout notre univers est fondé sur cette même dialectique : énergie/matière, matière/antimatière, ondes/corpuscules etc…
Par le passé, diverses théories en occident ont tenté d’évacuer l’un ou l’autre de ces deux termes, espérant réussir à expliquer l’univers soit par la seule énergie, soit par la seule matière. Elles ont toutes échoué à fournir un système explicatif cohérent du réel. Il semblerait que l’approche yin-yang soit incontournable…

Yin Yang et médecine chinoise

La médecine chinoise a très tôt adopté la théorie du Yin-Yang et l’a formalisée à un haut niveau de subtilité et de complexité.

Cette théorie fonde la plus grosse partie de l’acupuncture et passe ainsi d’une vision philosophique et métaphysique à une application pratique particulièrement efficace. Depuis 2500 ans, elle soigne des millions de chinois et maintenant d’occidentaux…

Il est impossible d’aborder cette complexité dans un article. Nous nous contenterons d’évoquer quelques grandes lignes.

En appliquant ce principe yin yang au corps, la tête, siège des fonctions psychiques, immatérielles, appartient au yang en comparaison avec le buste et l’abdomen, siège des principaux organes, matériels donc yin. 

En observant la sphère organique, la Médecine Traditionnelle Chinoise propose une division en deux grandes catégories :

  • Les organes yin assurant les principales fonctions internes vitales : cœur, poumons, pancréas-rate, foie, reins. 
  • Les viscères yang assurant la transformation et le transit des éléments provenant de l’extérieur : estomac, intestin grêle, gros intestin, vésicule biliaire, vessie. 

Chaque organe ou viscère répond lui aussi à la dialectique Yin Yang : l’aspect matériel, dense, de l’organe (yin) et la fonction qu’il remplit, plus subtile (yang). L’une des tâches de l’acupuncture consiste à rétablir l’équilibre entre ces deux aspects.

Il en va de même pour les méridiens associés à ces organes. Les méridiens liés aux organes yin circulent sur la face yin du corps :  face antérieure du tronc (yin) et antéro-interne des membres (yin) tandis que les yang circulent sur la face postérieure du tronc et postéro-externe des membres (yang). 

Cette répartition des méridiens semble être en lien avec la posture du fœtus durant son développement. En effet, la position fœtale, ovoïde, détermine des surfaces tournées vers l’intérieur et d’autres vers l’extérieur. Les faces tournées vers l’intérieur portent des méridiens Yin alors que les faces tournées vers l’extérieur portent des méridiens Yang.

L’alimentation et la respiration répondent aussi à cette gradation du dense et du subtil. Yin pour l’alimentation, yang pour la respiration.
D’une façon générale, on retrouve ce principe Yin-Yang dans les grandes fonctions vitales : la respiration ; inspir/expir, la circulation sanguine ; diastole/systole, l’équilibre électrochimique cellulaire ; pompe sodium/potassium etc…

La dialectique yin yang s’applique évidemment à l’énergie. Dès que celle-ci est produite par le système des 3 Foyers, elle assume deux fonctions distinctes : énergie nourricière, destinée aux fonctions internes (yin) et énergie défensive, tournée vers l’extérieur pour la protection (yang). Chacun des aspects évoqués précédemment peut être décliné de plus en plus finement. Ce qui fait de l’acupuncture traditionnelle une discipline particulièrement complexe.

Yin Yang et Tai Chi Chuan

La notion de Yin Yang est omniprésente dans l’enseignement du Tai Chi Chuan transmis par la lignée Yang (rappelons que ce « Yang » de la lignée est un nom de famille qui devrait en réalité s’écrire « Yeung ». Mais depuis son arrivée en occident il est de coutume de le transcrire ainsi. Il n’y a donc aucun rapport entre la lignée Yeung et le Yang de yin-yang…) 

Cela explique le choix même du nom de cette discipline puisque celui-ci représente la dynamique Yin Yang exprimée dans une unité opérationnelle.

Ce principe fondamental s’applique à tous les niveaux de la pratique :

  • la Forme elle-même, par ses mouvements alternant expansion et rassemblement et qui fournit l’assise à d’autres réglages plus fins.
  • les réglages de structure et de dynamique où les oppositions entre certaines parties du corps font cohabiter le yin et le yang dans le même temps.
  • les mouvements respiratoires qui expriment l’alternance Yin Yang. 
  • les mouvements de l’énergie où les phases d’expansion et de concentration se succèdent et s’engendrent mutuellement.
  • et aussi la mobilisation de l’énergie dans ces aspects nourriciers, yin, et défensifs, yang. 

Chacun de ces niveaux se traduit par des réglages précis et sophistiqués. Ce n’est qu’en respectant ce principe fondamental que l’on peut aboutir à une pratique cohérente du Tai Chi Chuan.
Nous nous attachons, à l’Institut de Tai Chi, à respecter cette approche rigoureuse.

Ces exemples de la relation Yin-Yang provenant de la physique, de la médecine, du Tai Chi Chuan ou tout simplement du quotidien nous signifient que le Yin Yang traite d’états ou de dynamismes opposés et complémentaires, d’alternances naturelles et d’engendrements réciproques qui structurent notre univers, du plus petit au plus grand de ses constituants. 

Pour le taoïsme, le Yin-Yang est l’expression spatiale et temporelle d’une unité première qui fonde l’univers, règle son fonctionnement et organise la vie.
Il est donc naturel de retrouver ces principes fondamentaux théorisés et appliqués dans la plupart des pratiques chinoises telles que la Médecine Traditionnelle, le Tai Chi Chuan, le Qi Gong ou le Yi King.

Vaste théorie…

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Jean Pierre

Cayrol Jean Pierre

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